Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Critiques de films

Critiques de films
Publicité
Archives
5 septembre 2009

Là-Haut

La_hautcoup_de_coeur

                                                            

                                                          9,0/10   

M. Fredricksen décide de partir à l’aventure, celle dont il a rêvé toute sa vie. Car M. Carl Fredricksen est un vieux bougon de presque quatre-vingt balais. Sa route sera semée d’embuches et de rencontres inattendues, mais il sera épaulé par un compagnon d’infortune : le jeune Russel. L’aventure s’annonce magistrale…

Dès le court-métrage précédant le film, les créateurs de chez Pixar nous surprennent encore par leur originalité et leur sensibilité. Ils signent ici un de leur meilleurs court-métrages, à la fois drôle et merveilleux, doté d’une imagination sans bornes. Et cela se poursuit avec Là-Haut.

Après seulement un quart d’heure de film, on est déjà plus que lié au personnage de Carl. Tout le talent de Pixar est de nous faire saisir toute l'empleur de sa personnalité, son passé, ses espoirs aussi, et ce en quelques minutes. Une vie entière qui défile sous nos yeux humides, impossible dès lors, de ne plus ressentir chaque émotion et chaque instant comme si nous connaissions ce vieux grincheux depuis de longues années. Un personnage attachant et inhabituel pour le cinéma, bientôt rejoint par un autre aussi haut-en-couleur : le petit scout Russel, plein de badges et de bonne volonté. Et l’aventure qu’ils vont vivre nous transportera avec eux jusqu’au bout du monde.

Car l’histoire qui les attend est si belle et féérique, tellement originale et imaginative... Et pourtant, son traitement et sa mise en scène et si naturelle et simple, qu’on arrive à se demander pourquoi nous n’y avons pas pensé plus tôt, et si ces péripéties ne font pas partie d’une ancienne légende. C’est là aussi une très grande qualité de ce long-métrage, arriver à nous émerveiller et à nous surprendre tout en gardant un fil accroché, non pas à un ballon, mais à notre quotidien et à nos rêves d’enfants. L’humour est toujours présent bien sûr, ainsi que l’aventure et l’émerveillement ; mais le film nous offre beaucoup plus.

Car Pixar réussit encore la transformation du dessin-animé, en grandissant un peu plus le genre. La mutation avait déjà commencé avec Wall-E, elle se poursuit ici. Pour la première fois dans un Walt Disney, on peut apercevoir du sang suite à une blessure, une petite révolution. Et ces réalisateurs de génie n’ont plus peur de montrer une part de vérité, et ce d’une manière absolument magnifique : la mort. Jamais un dessin-animé, voire même un film ne sera allé aussi loin, et de façon aussi subtile sur ce sujet et d’autres comme l’espérance, la vieillesse et surtout l’amour, qui est merveilleusement traité. Non pas l’amour de l’aventure, mais le véritable amour. Et pas celui des princesses et des princes charmants, mais celui qu’un vieil homme porte à sa chère épouse, avec qui il a partagé tant de rêves toute leur vie. Très loin des clichés liés au genre, le film réussit la prouesse de nous redonner espoir ; l’espoir de vivre, celui d’accomplir ses rêves, et l’espoir d’aimer.

Très peu de défauts pour ce chef d’œuvre, hormis quelques incohérences sans importance. Des petits détails qui passent réellement inaperçus tant le rêve nous transporte. La musique composée par le talentueux Michael Giacchino est sublime, on regrettera peut-être le manque de variété dans la bande originale, et l’utilisation répétitive du thème principal. Mais on peut aussi le considérer comme un élément nécessaire pour lier l’histoire, comme une sorte de fable racontée sur le même air, alors qu’elle nous fait voyager à l’autre bout du monde.

Très loin des dessins-animés à gags comme L’Âge de Glace ou Madagascar, Là-Haut est un véritable long-métrage à part-entière. Un peu moins critique et avant-gardiste que Wall-E, il est quand même ce qu’on fait de mieux dans le divertissement actuel : du rêve, de l’amour et de l’esprit. Paul Eluard disait qu’ « Un rêve sans amour est un rêve oublié », vous n’êtes pas prêts d’effacer celui là de votre mémoire !

                                                                                                                                 

Clément Bastie

Publicité
Publicité
11 février 2009

Gran Torino

Gran_Torinocoup_de_coeur

                                                            

                                                          9,0/10   

Clint Eastwood nous revient derrière et devant la caméra pour un film éloquent et actuel. Il y incarne le rôle principal, celui d’un vétéran acariâtre, accablé par son passé et enclin à un certain racisme. De nombreux immigrants se sont installés dans son quartier ainsi que des gangs, ce que le vieil homme a du mal à différencier. Tiraillé entre nostalgie et mélancolie, ostracisme et patriotisme, il a beaucoup de mal à continuer à vivre dans cet endroit bien loin de ses idéaux. Quelque chose le poussera néanmoins à reprendre les armes pour combattre la violence...

Très loin de l’Échange et de son classicisme démesuré, la réalisation est ici plus naturelle, moins codifiée et pourtant bien plus efficace ; elle est toute aussi talentueuse que celle de Million Dollar Baby. Au-delà, la prestation du maître Eastwood est tout simplement exceptionnelle, criante de vérité mais toujours avec cette retenue inhérente au personnage. Son regard bleu emplie de lassitude et pourtant d’une surprenante bienveillance exerce sur la caméra un incroyable magnétisme.

L’autre force du film est sans conteste son sujet, habituellement mal traité au cinéma, trop souvent de manière manichéenne ou patriotique. Le racisme est ici abordé sous tous ses angles, car s’il existe différentes discriminations il n’y a qu’un seul racisme. Le film montre bien ses origines, sa nature et les réponses qui peuvent y être apportées, en cela il apporte réellement sa pierre à l’édifice en étant un film engagé et pas seulement narratif. D’autres thèmes majeurs sont également développés : l’isolement des personnes âgées, la difficulté de dialoguer avec leur entourage ainsi que la religion. Pourtant connu comme un habituel conservateur, Clint Eastwood la présente ici d’une façon unique qui offre une réelle interprétation de la foi.

Grâce à un scénario remarquable et à un Clint Eastwood étincelant devant et derrière l’objectif, Gran Torino nous pousse à réfléchir sur des sujets majeurs tout en nous divertissant, un véritable essai livré ici par le réalisateur

                                                                                                                                 

Clément Bastie

20 janvier 2009

Diary of the Dead

657navet2

2,0/10

                                                                    Alors qu’un groupe d’étudiants américains tourne un film d’horreur à petit budget en pleine nuit, une terrible nouvelle tombe à la radio et aux journaux télévisés : des morts reviennent à la vie dans tout le pays et s’attaquent aux gens sans raison apparente. Effrayés et curieux, nos étudiants cinéphiles décident d’arpenter, caméra à l’épaule, les lieux touchés par ces massacres afin d’en laisser un authentique témoignage à la postérité.

                                                                                                                    Inutile de tourner autour du pot, le maître des films de zombies, Georges A. Romero, a lamentablement échoué dans sa tentative de renouvellement du genre ; surfant sur la vague des derniers films à « caméra sur épaule » (Cloverfield et [REC]), le long métrage ne fait décidément preuve d’aucune originalité, ni dans le fond (bande d’étudiants apparentés à des clichés sur pattes et sempiternelles situations propres au genre), ni dans la forme (phénomène de mode susmentionné et musiques permettant juste de faire sursauter, à défaut de proposer une vraie peur au spectateur…). Ainsi, on s’ennuye du début à la fin, si on a le courage de rester assis jusqu’à cette délivrance, si on est attaché au siège ou si on a une critique de film à rédiger. Et quelle noble cause qu’est celle de vivement vous déconseiller un tel amas de banalités ; choisissez plutôt une autre œuvre, et il est inutile de préciser laquelle en particulier, tant il serait difficile de trouver pire en ce moment. En outre, les purs fans de morts-vivants, quant à eux, préféreront regarder une énième fois Land of the Dead, du même cinéaste, ou Dawn of the Dead de Zack Snyder. Et les amoureux désireux de connaître un petit frisson cinématographique à deux feront mieux de passer leur chemin. Tout le monde est maintenant prévenu…

Vous l’aurez compris, il n’y a pas grand-chose (rien?) à sauver au sein de ce désastre, on pourrait pousser l’ironie jusqu’à ranger sa relativement courte durée (1h35) dans les points positifs, mais c’est encore trop long : attendez dans votre canapé pendant 95 minutes que l’on vienne vous annoncer une bonne nouvelle, cela ne paraît-il pas comme étant une éternité ?

Pour conclure, le réalisateur new-yorkais n’aura donc pas réussi à innover dans ce genre commençant à se décrépir telle la chair de ses propres zombies. Banal et ennuyeux, ce spectacle affligeant dégage de tenaces relents de « pompe à fric » estampillée Romero. Pourtant, un film n’aura jamais aussi bien porté la mention « Pour public averti », en supposant que, désormais, vous l’êtes réellement.

                                                                                                                                                                                                      Christophe De Noni

11 janvier 2009

Les Insoumis

largeposter_2831107,5/10

                                                                                                                                                  Drieu est un homme détruit, brisé et fatigué ; lorsque cet énigmatique vétéran de la BRB débarque dans un petit commissariat de province voué à la fermeture il prend à bras le corps la lutte contre le crime. Proche de la dépression, il s’accroche étonnamment à la poussiéreuse main courante du commissariat où s’accumulent depuis des années les plaintes et délits du quartier. L’équipe submergée par la violence et la délinquance de cette banlieue n’a en effet plus aucune envie d’en découdre. Drogues, armes, braquages, blanchiment d’argent, la pègre locale parfaitement ramifiée s’est implanté dans tous les milieux. Drieu vient alors donner un coup de pied dans la dangereuse fourmilière de la pègre, prenant tous les risques et bien décidé à aller jusqu’au bout.

Craint par certains car premier film du téléaste Claude-Michel Rome (Zodiaque et sa suite), assez justement annoncé par d’autres dans la lignée de 36 quai des Orfèvres et MR73, Les Insoumis est un polar musclé et efficace superbement interprété. Richard Berry y incarne impeccablement le rôle du flic usé inhérent à ces scénarii sombres et réalistes. On y retrouve également le commissaire divisionnaire défaitiste et renoncé joué par Zabou Breitman amenant une touche de féminité dans ce milieu masculin quoique déjà adouci par la belle Aïssa Maïga. Pascal Elbé vient compléter cet imposant casting avec son personnage de flic égoïste et sûr de lui.

                                                                                             

Là où la distribution fascine, le scénario convenu et prévisible sonne comme le défaut principal du film, peut-être à rapprocher à la collaboration du scénariste sur Astérix aux Jeux Olympiques. Ce qui est certes un sérieux défaut est en partie éclipsé par une très bonne photographie ainsi qu’un montage talentueux insufflant au film une ambiance particulière et une nervosité permanente. Loin de l’atmosphère humide de MR73, Les Insoumis nous attire sous la chaleur lourde et pesante du soleil baignant cette ville polluée et gangrénée. Il convient aussi de souligner l’ambiance régnant dans l’équipe, comparable à celle de la très bonne série Engrenages, aussi ombrageuse que fraternelle bien que les personnages soient ici assez malencontreusement stéréotypés. Notons également la bande originale très réussie, de la même trempe que celle de la trilogie Jason Bourne qui nous offre une excellente immersion.

                                                                                        

En conclusion, Les Insoumis, bien que légèrement entaché par un scénario plutôt modeste et de regrettables poncifs, se trouve bien dans le renouveau du polar français. Il s’agit là d’un film énergique et distrayant qui augure une reconversion réussie à Claude-Michel Rome.                                                                                                                                
                                                                                    
Clément  Bastie

17 novembre 2008

Le Nombre 23

le_nombre_238,0/10

                                                                                                                                            Walter Sparrow mène une existence des plus routinières qui soient, il passe ses journées à travailler pour la fourrière locale et ses soirées chez lui en compagnie de sa femme et de son fils. Pourtant, le jour de son anniversaire, tout bascule, ce jour-même où son épouse lui offre un bouquin intitulé 'Le Nombre 23'; le récit lui plaît, ça ne fait aucun doute, mais il décide de débuter une enquête sur le mystérieux auteur du livre lorsqu'il se rend compte que la trame recèle beaucoup de similitudes avec sa vie, beaucoup trop…

C'est donc avec ce thriller ésotérico-dramatique que reviennent en piste le réalisateur Joel Schumacher et le brillant Jim Carrey, soit 12 ans après leur première collaboration sur le film Batman Forever (non, ne fuyez pas!). Autant apaiser tout le monde sans plus tarder : on est ici très loin du "film" susmentionné. Assurément, le metteur en scène revient en forme, avec un cinéma revu et corrigé, pour le plus grand bonheur de l'assistance; il vous emmène cette fois sur le chemin de l'obsession, et de la folie qui en découle, au côté de son personnage principal, un chemin parsemé d'un suspense croissant qui n’est pas de refus, que l'on accepte même bien volontiers pendant que Walter Sparrow, lui, se plonge avec une mine réjouie dans son nouveau roman. Néanmoins, tout n’est que métamorphose dans cette intrigue: la pointe d'humour devient celle du couteau, le sourire devient rictus psychotique et le suspense penche vers l'angoisse. Dès lors, vous vous surprenez à utiliser vous aussi votre nouvelle obsession pour le "nombre maudit" afin de résoudre l'énigme, et à ce moment, il est déjà trop tard : vous êtes tombé dans le piège du réalisateur en vous identifiant au (anti)héros, qui lui-même s'identifie à celui de son bouquin.

En bref, la magie opère à votre insu, bien aidée par de multiples effets de style du meilleur cru, une bande originale adéquate, une image au grain particulier et par une interprétation de haute volée avec, en l'occurrence, un grand Jim Carrey qui n'a de cesse de crier sa polyvalence sur tous les toits, non pas ceux des médias, mais judicieusement ceux de son terrain de jeu: les grands films.

Enfin, le seul fait que l'on puisse reprocher à cette œuvre, s'il s'agit vraiment d'un défaut, est qu'elle se destine à un public assez restreint, c'est-à-dire uniquement aux amateurs de thrillers étranges, oppressants, à tendances fantastiques (même si le cinéaste fait preuve de perspicacité en atténuant les côtés invraisemblables en saupoudrant sa création de vérités historiques); en revanche, si ce profil correspond au vôtre, n'hésitez pas un seul instant.


Pour conclure, Joel Schumacher semble être à l'écoute du public qui désire sans cesse le renouveau en nous servant sans doute là son meilleur film (depuis 'Phone Game'), un thriller aussi captivant que poignant, une ode à la paranoïa qui, tout comme la prestation de Jim Carrey, ne laisse, en aucun cas, indifférent.
                                                                                                                                                                                                        Christophe De Noni

Publicité
Publicité
17 novembre 2008

Les Promesses de l'ombre

affiche_Les_Promesses_de_l_Ombre_Eastern_Promises_2006_2                          coup_de_coeur

9,0/10

                                                                       Après la réussite de son A History of Violence, salué par la presse et les spectateurs, David Cronenberg ne pouvait que poursuivre dans la voie qu’il venait d’ouvrir, celle qui lie la mafia et la violence visuelle payante, dans le sens ou elle est loin d'être gratuite. Le choix de l’acteur principal était simple après la prestation de Viggo Mortensen dans son précédent film, notre cher réalisateur a bien compris qu’il exprimait à la perfection le mystère, la force, la violence et l’ambiguïté.

Dans le film, il incarne le ténébreux Nikolaï, chauffeur d’un clan criminel russe installé au cœur de Londres : les Vori v’Zakone, dirigés de main de fer par Semyon (Armin Mueller-Stahl) et son fils Kirill (Vincent Cassel). Anna (Naomi Watts), sage-femme à l’hopital, voit arriver dans son service une inconnue de quatorze ans ; suite à de graves complications, la jeune femme décède en mettant au monde une petite fille. Sans indications sur son identité, Anna cherche des informations dans le sac à main de l’enfant et y trouve un journal entièrement rédigé en russe, une carte à l’intérieur : celle du restaurant Trans-Siberian dont le patron qui n’est autre que Semyon se propose de traduire le carnet. Il s’avère qu’il contient de nombreux témoignages compromettants pour son fils Kirill, il va donc tout mettre en œuvre pour assurer la pérennité de son clan grâce à son nouvel homme de confiance : Nikolaï.

Il convient tout d’abord d’approcher la violence du film : elle est crue, réaliste et traumatisante mais totalement indispensable pour nourrir le discours du film. Le réalisateur nous choque, nous dérange, mais nous force à affronter ce qui est devenu une réalité pour de nombreuses personnes. Face à cette violence outrancière, on retrouve des valeurs majeures dans ce genre de clan : honneur, fraternité, sacrifice et allégeance… Autre élément magistral du film : les tatouages qui prennent une importance colossale puisqu’ils notifient le rang et la distinction, comme insignes et médailles ; chaque tatouage a sa signification ; ainsi dans la pègre russe, un homme sans tatouage n’est rien. Après vérification, tout cela est exact et dénote d’un fabuleux travail de Cronenberg. L’autre sujet superbement abordé est l’alcool, le film ne se contente pas des stéréotypes liés aux peuples russes, il réussit à lier tout ce qui les compose : prostitution et alcool vont de paire au royaume des truands soviétiques et les dérives que cela entraine.    

                               
Le jeu des acteurs est plus qu’à la hauteur du sujet traité : Viggo Mortensen, dans le rôle le plus difficile de sa carrière, n’a pas hésité à donner de sa personne, à travailler sans relâche pour s’imprégner de l’empreinte russe et le résultat est tout bonnement incroyable ; une des meilleure interprétation qu'il m'ait été donnée de voir ; il entre désormais dans le cercle très privé des plus grands acteurs. Vincent Cassel et Naomi Watts, bien que sous l’ombre de Viggo, font une prestation sans précédent, d’une formidable justesse et d’une émotion saisissante, et si le film porte bien son nom, ces rôles devraient leur permettre d’atteindre le rang des acteurs favoris des meilleurs réalisateurs. A souligner aussi, une magnifique bande son offerte par Howard Shore, compositeur attitré de Cronenberg. Tous les rôles secondaires sont également bluffant, si bien que le film prend une dimension descriptive sous son envergure narrative et vous vous sentirez contrarié et coupable d’en savoir autant sur un milieu aussi dangereux.

Les Promesses de l’Ombre est à rapprocher de films comme Le Parrain, Les Affranchis ou Casino, ils se réunissent sur tout ce qui fait de ces longs-métrages des chefs-d’œuvre : intrigue, violence, réalisme, ambiance, performance artistique et, n’ayons plus peur de le dire, casting, car oui désormais, et je l’espère, ces trois acteurs vont continuer de nous offrir ce que nous attendons du cinéma : du divertissement intelligent.                                                                                                             

Clément Bastie

16 novembre 2008

Les Infiltrés

infiltres

culte

                                                                       9,0/10

                                                                       Qui n'a jamais entendu parler de Martin Scorsese ? Grand metteur en scène depuis près de quarante ans, son talent n'est certes plus à prouver, mais bien à confirmer, tel est le défi de tout réalisateur expérimenté; défi qu'il relève avec brio en revenant à son univers mafieux qui lui est si cher, en frappant le spectateur de son panache habituel -tant dans la mise en scène que dans le script- qu'il insuffle totalement à son dernier chef d'œuvre: Les Infiltrés.
    
Boston, le plus Irlandais des quartiers américains, est le théâtre d'une lutte acharnée qui oppose depuis de nombreuses années la pègre irlandaise aux forces de l'ordre, chaque clan recourant à tous les moyens possibles pour faire chuter l'autre, jusqu'à flirter avec les limites de l'envisageable et de la perfidie; c'est ainsi que
la Police d'Etat décide d'infiltrer le gang de Frank Costello (Jack Nicholson) avec leur jeune recrue sortie des quartiers pauvres, Billy Costigan(Leonardo DiCaprio). Parallèlement, Colin Sullivan (Matt Damon) entre dans la police et y devient discrètement l'informateur de celui qu'il considère comme son propre père, Frank Costello… Ces deux espions vont donc mener une double existence, perdant tour à tour leurs repères, puis leur propre identité, mais lorsque chaque camp réalisera qu'il recèle une taupe en son sein, ils perdront aussi le droit de choisir, dans une course où découvrir l'identité de leur homologue, mais néanmoins adversaire, est devenu synonyme de survie.
    
Nouvelle version du film hong-kongais "Infernal Affairs", on parlera pourtant d'hommage à ce dernier tant l'ombre du remake ne plane qu'un très court moment; en effet, Scorsese parvient à se démarquer brillamment du modèle, voire même à le transcender, à transformer cette épopée du crime en un sensationnel drame shakespearien, se préoccupant de la profondeur de ses protagonistes tout en conservant un rythme élevé grâce à de pures scènes d'action,mais aussi à la tension psychologique des situations mises en scène avec un goût relativement impartial vis-à-vis des deux personnages principaux. Aussi, c'est certainement au niveau du suspense que le réalisateur frappe le plus fort, il n'hésite pas à jouer avec les faux-semblants et le thème de la trahison pour duper le spectateur simultanément aux personnages, ni à rajouter de l'intensité là où l'on pensait qu'elle était arrivée à son comble, pour aboutir à un final tout à fait stupéfiant, aussi endiablé que la musique servie tout au long du film.
    
En outre, il ne faut pas omettre que ce délicieux thriller est porté par l'énergie de son casting éblouissant, composé de jeunes, et de moins jeunes, acteurs faisant partie des meilleurs de leur génération respective; à commencer par un Jack Nicholson troublant d'authenticité dans son rôle de parrain aussi mafieux que mégalomane, confirmant sa prédisposition à jouer les méchants à l'humour décapant, suivi par un tout grand Leonardo DiCaprio, talent dont pâtit quelque peu Matt Damon, qui nous livre une interprétation juste, mais qui relève du minimum syndical, le tout complété par une pléiade de seconds rôles impressionnants , tels que Mark Wahlberg, Alec Baldwin, Vera Farmiga et Martin Sheen.
    
En conclusion, Martin Scorsese, du haut de ses 40 ans de carrière, ne cesse de marquer ses aficionados ou de rallier de nouveaux fans, il touche à la perfection en signant un film de genre très noir qui n'exige pas d'aimer les polars pour être apprécié à sa juste valeur; après tout, amateur ou détracteur, quand il s'agit d'un chef-d'œuvre, où est la différence ?

                                                                                      Christophe De Noni

16 novembre 2008

L'échange

18998101_w434_h_q80

7,5/10

                                                                                                                                           Depuis qu’il a réussit à prouver qu’il était un réalisateur à part entière, chaque nouveau film de Clint Eastwood est un évènement, il nous faut tout de même garder un regard objectif sur l’œuvre du maître. Il nous revient aujourd’hui avec un scénario de l’ancien journaliste J. Michael Straczynski basé sur l’histoire vraie de Christine Collins. Cette mère de la banlieue de Los Angeles dont le fils a disparu et à qui la police va remettre un enfant qui n’est pas le sien. Le récit nous invite à suivre cette mère désabusée dans son combat pour la vérité, combat dans lequel elle pourra s’appuyer sur l’aide du Révérend Briegleb, parfaitement incarné par John Malkovich.

Dès les premières minutes du film, le style Clint Eastwood est amplement perceptible : de larges plans, de longs travelings et la photographie magistrale de Tom Stren la dirigeant sur tous les films réalisés par Clint. Tous les codes du cinéma hollywoodien sont aussi présents, le film parait dès lors d’un classicisme étonnant, frôlant souvent les banalités cinématographique mais toujours avec discernement, comme en guise d’hommage. Le film sonne en effet comme un vibrant tribut de l’enfant d’Hollywood au cinéma, une preuve de plus de l’attachement du réalisateur à son parcours. Malheureusement la plupart du scénario est elle aussi codifiée, aucune surprise ou prise de risque scénaristique, on suit lentement la route tracée du récit.

Tout cela a au moins le mérite de poser la question des bandes-annonces et de leur utilité, en effet si on subit la majorité du film il y a de grandes chances qu’elles en soient les principales responsables. Elles dévoilent beaucoup trop de l’histoire, trop de rebondissement pour qu’on vive pleinement cette première heure que l’on connait déjà sur le bout des doigts. Heureusement un élément majeur et inattendu va venir réveiller le spectateur, avec succès pour certains ou en vain pour d’autres.

Malgré un scénario plutôt convenu, le film reste brillant grâce à sa principale qualité qui réside dans les prestations des acteurs, Angelina Jolie en tête, tout simplement méconnaissable dans ce rôle qu’elle incarne avec ferveur. Ne négligeons pas non plus les autres comédiens (Jason Butler Harner, Jeffrey Donovan et les enfants) qui nous offrent des interprétations exceptionnelles. La bande sonore plutôt effacée laisse toute la place à leur jeu, sublimé par la caméra d’Eastwood. Les personnages sont également assez complexes et contrastés pour que le film ne sombre pas dans un manichéisme caricatural ; et le spectateur reste donc libre de son jugement.

A l’aide d’une mise en scène classique et d’éléments traditionnels du cinéma américain, le film réussit à magnifier l’interprétation des acteurs ; certains y verront un film prétentieux surtout destiné aux oscars, d’autres le verront comme un témoignage conservateur de l’ancien cow-boy au cinéma qui l’a élevé au rang d’icône. Un film qui restera pourtant insipide dans la filmographie plus transcendante et moins académique du maître Eastwood.

Clément Bastie

13 novembre 2008

Blindness

untitled

coup_de_coeur

                                                            

                                                          9,0/10   

La vue est certainement un de nos sens les plus propices aux métaphores. Pourtant, le cinéma n’avait, jusqu’ici, que trop rarement exploité ce thème de façon honorable (en témoigne le récent mais médiocre The Eye, par exemple) ; c’est alors qu’intervient un réalisateur engagé, Fernando Meirelles, pour nous offrir son petit bijou d’anticipation : Blindness.

Tout commence très mal, lorsqu’un conducteur malheureux perd la vue aux abords d’un feu rouge ; phénomène isolé ou réel danger ? La population ne tarde pas à être fixée, car la maladie se propage à une vitesse fulgurante et le monde commence à broyer du noir en ne distinguant néanmoins que du blanc. Effectivement, la pandémie ne plonge pas ses victimes dans l’obscurité, mais dans une blancheur laiteuse, immaculée. Tous sont frappés, même l’ophtalmologue régional, qui sera à n’en pas douter d’une aide précieuse lorsque les malades, y compris lui, seront placés en quarantaine dans un dortoir désaffecté. Mais, leur soutien le plus précieux viendra cependant de son épouse, qui, par amour, infiltre le dortoir sans avoir été contaminée. Sans savoir que pour survivre, cet amour devra se changer en pure solidarité…

C’est là que débute le réel tour de force du cinéaste brésilien, qui n’a de cesse de jouer avec les effets d’optique (blanc omniprésent, flous, reflets et illusions), pour conférer à son œuvre une capacité d’immersion presque sans égal, accentuée par le personnage de Julianne Moore, qui, par son statut de seule « voyante » du groupe, nous prend à parti comme second témoin oculaire. Parlons d’ailleurs du casting, très brillant, composé notamment de Mark Ruffalo, de Geal Garcia Bernal, qui  interprètent à merveille des personnages dépassés par les événements ; des protagonistes dont on ne saura les noms, dans un élan de dépersonnalisation où, paradoxalement, la nature humaine est mise à nu avec beaucoup de recul.  Le metteur en scène n’hésitera donc pas, entre deux moments de bravoure et surtout de déchéances, à faire le subtil parallèle entre notre espèce et nos voisins les animaux.

Si seulement la profondeur du propos s’arrêtait là, nous aurions tout au plus un ersatz des Fils de l’Homme, il n’en est rien, car le film prend également des proportions politiques quand, dans un esprit d’ordre et de rationnement des vivres, le dortoir met en place, bon gré mal gré, une autorité qui va rapidement tourner à la dictature aux relents hypocrites de démocratie. Il faut aussi évoquer le thème religieux, qui met le doigt sur un culte devenu bancal car versatile et multi-interprétable. La seule voix fiable en cette période de chaos étant celle de Danny Glover, ancien borgne devenu sage dans le désespoir ambiant.

Au niveau de l’ambiance sonore, nous avons droit à des musiques certes pas inoubliables, mais bien en phase avec l’action; les bruitages, quant à eux, sont du meilleur acabit et font souvent frissonner.

Pour conclure, Fernando Meirelles nous présente une fois de plus un très grand film, une fable d'un réalisme éclatant, dont les partis pris sont tant scénaristiques que visuels. Mais, si au royaume des aveugles, les borgnes sont rois, le seul vrai juge restera toutefois le spectateur de ce chaos éblouissant.

                                                                                                                                 

Christophe De Noni

Publicité
Publicité
Publicité